Critique : Viva La Libertà

Par Guillaume Meral
5 février 2014
MAJ : 21 août 2018

D'Il divo, force est de constater que le cinéma italien contemporain semble bien décidé à honorer à nouveau son glorieux patrimoine, du temps où il n'hésitait pas à questionner le destin politique du pays depuis le trou de serrure des arcanes du pouvoir. Pénétrer dans l'impénétrable et les secrets de cour gardés par les cerbères de la vie publique, pour mieux faire revenir à la table des débats le citoyen, bousculé et interpellé par le spectacle.

De fait, si Viva la libertà ne prétend pas jouer dans une veine aussi corrosive qu'un Bulworth) entraîne son spectateur vers les rives d'une fragmentation identitaire labyrinthique. Jusqu'à finir par côtoyer l'abstraction inhérente aux œuvres abordant le dédoublement de personnalité, à plus forte raison que la galvanisation progressive du peuple et des médias par le jumeau ne fasse basculer le film dans une sorte d'onirisme dont la nature décalée et ensoleillée va venir éclairer le propos du réalisateur.

En effet, c'est paradoxalement en mettant le déchirement existentiel de son héros au centre de sa narration, parfois jusqu'à reléguer son contexte électoral en toile de fond, que le film sollicite une filiation atypique dans la paysage du cinéma italien, et lui confère toute  sa singularité : la fable politique façon Frank Capra. De fait, le plébiscite général soulevé par le frère jumeau, ainsi que la contagion salvatrice produite par sa folie douce, à la fois sur ceux qu'il côtoie et sur le peuple transporté par ses propos, renvoie inexorablement à ces histoires d'homme providentiel improbable venant extirper les gens du marasme ambiant, non pas en s'imposant comme leader d'un renouveau utopique, mais en leur donnant les clés de leur responsabilisation. Comme pour mieux renvoyer le peuple dos-à-dos à ses hommes de pouvoir finalement, le premier se projetant dans le dédoublement du héros à mesure que l'euphorie d'un horizon alternatif s'offre à lui. Une proposition dont l'humanisme vibrant ne résonnerait pas de la même façon sans la performance bluffante de Toni Servillo, égérie de cette schizophrénie collective pleine d'espoir.

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