L’heure des semi-pros
Comment raconter des histoires palpitantes dans le registre de la traque d’espionnage à l’heure de l’ultra-surveillance ? Là où les années 90 en ont puisé une source de paranoïa naissante, parfaitement accordée à l’émergence d’un montage plus haché et de multiples caméras omniscientes (merci Tony Scott), la saga Jason Bourne a semblé marquer une forme de finalité du genre, en opposant le corps toujours en mouvement de Matt Damon à des data au transit instantané et insaisissable.
The Amateur a bien conscience de cette limite, et s’amuse même dans sa première partie à déjouer les codes du film d’espionnage par une absence étonnante d’obstacles. En quelques minutes, Charlie Heller, un spécialiste informatique de la CIA forcément introverti (et que Rami Malek joue tout du long en incarnant l’expression “comme un lapin pris dans les phares”) reçoit par une source anonyme des secrets compromettants sur son service qu’il décrypte aussitôt.

Après tout, il ne s’agit même pas du vrai point de départ de l’intrigue, mais d’un moyen de pression sur ses supérieurs pour partir à la traque des terroristes qui ont exécuté sa femme. Là encore, le temps d’un montage volontairement décevant et fluide, le cryptographe parvient à identifier les quatre criminels à grands coups de sons isolés et de recréation d’espaces en 3D, obtenus en quelques clics.
C’est bien cette tension qui semble intéresser James Hawes, entre les possibilités d’une technologie de plus en plus invasive et autonome, et la nécessité de la volonté humaine pour lui donner un but, une direction. The Dark Knight et d’autres films américains sortis après le Patriot Act interrogeaient à leur manière ce trop grand pouvoir donné à une poignée d’individus. The Amateur l’observe plutôt comme une fatalité, déjà à nos portes depuis longtemps. Sans même évoquer les géants de la tech et la question de nos données personnelles, le long-métrage crée une ambiance mortifère, une sorte de résignation collective face à la présence de Big Brother.

Rami Balek ?
Malheureusement, il faudra se contenter de cette ligne ténue (bien que fascinante), tandis que le film se planque derrière son scénario rebattu de revenge movie. Malgré la dimension fondamentalement politique de son sujet, The Amateur tourne autour du pot, et esquive toute revendication (qu’elle vienne des antagonistes ou de la CIA) au profit de la colère de son anti-héros sensible mais déterminé.
Ce flou contextuel, bien qu’il ne soit pas totalement incohérent avec le fatalisme de son approche (on peut penser à l’hermétisme de Hacker, la virtuosité de Michael Mann en moins), semble tout de même un peu lâche au vu des enjeux. Certes, on n’a pas attendu James Hawes pour apprendre que les “black ops” à l’américaine faisaient souvent des dommages collatéraux, et on aurait justement aimé que l’ensemble aille plus loin, et travaille cette zone grise qu’il cherchait à introduire.

A la place, The Amateur troque sa première partie déstabilisante pour une intrigue beaucoup trop programmatique autour de la soif de sang de Heller et la perte progressive de son humanité. Le long-métrage semblait pourtant tenir une idée intéressante au vu de l’incapacité de l’homme à tuer avec une arme à feu, préférant des mises à mort distantes en accord avec son ingéniosité (le coup de la piscine fait son petit effet, on l’avoue).
Dans ce vigilante movie qui ne s’assume jamais vraiment, et dont l’ambiguïté morale est très vite balayée, James Hawes n’a pas grand-chose d’autre à raconter que la trajectoire logique de son protagoniste. On se demande même ce que Laurence Fighburne et Jon Bernthal sont venus chercher dans les rôles de PNJ qu’ils se contentent de jouer aux côtés de Rami Malek. En voulant se risquer à un certain équilibre entre l’aridité d’un John Le Carré et l’exotisme de globe-trotter à la James Bond, The Amateur ne tranche pas… et finit par ennuyer.
Vous êtes mon site de cinéma favori depuis mes années lycée (ça veut dire bientôt 20 ans ) mais je suis extrêmement déçu que vous n’ayez fait aucune critique sur fanon et sur zion …
Et un FLOP de plus .