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Un mariage sans fin : critique du Palm Springs raté sur Amazon

Par Clément Costa
2 juin 2025

Remake français du très bon Palm Springs de Max Barbakow sorti en 2020, Camille Rowe dans une boucle temporelle interminable. En résulte une pâle copie dénuée de la moindre envie de mise en scène.

WEDDING NIGHTMARE

Avec son excellent Palm Springs, le cinéaste Max Barbakow proposait en 2020 une des relectures les plus drôles et inventives du concept de boucle temporelle depuis le classique Un jour sans fin. L’idée était simple : deux invités condamnés à revivre la même journée de mariage. Doté d’un petit budget mais de grandes idées, le film s’illustrait grâce à sa mise en scène ludique et son casting irréprochable. Ces deux qualités majeures font totalement défaut à Un mariage sans fin, remake sans âme réalisé par Patrick Cassir.

Sur le plan de la mise en scène, cette version française se rapproche bien plus d’un sketch YouTube époque Studio Bagel qu’à un long-métrage professionnel. Tout est bêtement illustratif et désincarné. La caméra ne reflète aucun point de vue. Le montage et le découpage tentent de dynamiser grossièrement le récit. Sans oublier la musique qui s’arrête pour souligner des gags convenus, comme si tout le monde savait que l’écriture ne suffirait pas à arracher le moindre sourire aux spectateurs.

un mariage sans fin
Idée d’activité bien plus divertissante que le film

Côté casting, difficile de er après Andy Samberg et Cristin Milioti. On retiendra tout de même les efforts de Camille Rowe qui fait de son mieux pour jouer avec naturel des dialogues souvent bâclés. Déjà présente dans le naufrage Sous emprise sur Netflix, l’actrice franco-américaine devrait probablement s’éloigner des films de plateforme et chercher des rôles à la hauteur de son talent.

On ne peut malheureusement pas en dire autant de Tarek Boudali. Au fil des années, le comédien a développé un tempo comique évident et s’en sort décemment dans les séquences humoristiques. En revanche, il e totalement à côté des moments plus dramatiques. Sa performance linéaire et superficielle fait totalement perdre au protagoniste sa complexité et ses zones d’ombre.

un mariage sans fin
Quand tu te demandes ce que tu fais là

ET ÇA CONTINUE, ENCORE ET ENCORE

Bien au-delà de son échec technique, Un mariage sans fin manque cruellement d’idées d’écriture. Malgré une durée d’à peine 1h20, le film tourne en rond et fatigue. Au premier regard, les films se ressemblent comme deux gouttes d’eau. Les décors sont similaires, les protagonistes sont habillés de la même façon, certains dialogues semblent avoir été copiés à la lettre par Google Traductions. Mais le film de Patrick Cassir n’arrive jamais à être plus qu’une copie fade et sans âme.

On assiste tout simplement à un long-métrage qui imite sans comprendre son modèle. Il en vient ainsi à rendre banales des idées brillantes. L’humour de gêne qui faisait des ravages dans l’original est si mal dosé qu’il en devient embarrassant. On est gêné par le long-métrage, non pas avec lui. Idem pour l’humour de répétition, essentiel à la réussite d’une comédie de boucle temporelle. Plutôt que d’appuyer avec malice sur ces effets comiques, Un mariage sans fin semble rapidement lassé de son propre concept.

Camille Rowe et Tarek Boudali dans Un mariage sans fin
C’était pas leur guerre

Lorsque de rares changements apparaissent, ça ne fonctionne pas forcément mieux. Le fait que Paul ne tente même pas de dire à Louna de ne pas le suivre dans la grotte, par exemple vient rajouter une couche d’égoïsme au protagoniste, sans que ça ne soit jamais réellement abordé. Le cadre d’un mariage de riches français au Maroc, qui s’approprient une culture étrangère comme une curiosité exotique, pouvait également offrir des pistes ionnantes. Mais là encore, le film n’en tire qu’une poignée de blagues tièdes.

Une des rares touches d’originalité qui réussit au film de Patrick Cassir provient du personnage incarné par Youssef Hajdi, dont le rôle était tenu par J. K. Simmons dans l’original. Il apparaît ici comme un personnage plus tendre et désespéré. On développe sa vie de famille, ses liens intimes et sa capacité à s’émerveiller de la magie du quotidien. Ses séquences sont probablement les seuls moments lors desquels Un mariage sans fin semble avoir quelque chose à nous dire.

un mariage sans fin
Si seulement ça n’était qu’un mauvais rêve

ET POUR QUOI FAIRE ?

Une des forces de Palm Springs était sa richesse thématique. Plus qu’un honnête divertissement, le film de Max Barbakow proposait des réflexions ionnantes sur le mariage, la dégradation des relations humaines, le nihilisme, l’hypocrisie en société et bien d’autres thèmes encore. En ne cherchant qu’à répliquer l’aspect comique sans réfléchir au message, Un mariage sans fin se condamne à être une relecture profondément creuse.

Dans le film de Patrick Cassir, les deux protagonistes ne sont que des stéréotypes désincarnés. Le réalisateur français semble ne pas comprendre qu’il ne suffit pas de citer du Céline le temps d’un dialogue pour établir la complexité psychologique d’un protagoniste. D’autant que Paul et Louna ne vont rien apprendre de l’expérience qu’ils traversent. Tout est si trivial qu’on ne perçoit pas d’évolution majeure. 

un mariage sans fin
Plus creux que ça tu meurs

L’ouverture du film nous laisse entrevoir une forme de réflexion très littérale avec l’utilisation d’une voix-off douce-amère façon Bref. Rien de révolutionnaire, mais un processus prometteur. Cependant, l’idée est expédiée dès la séquence suivante et ne sera plus jamais utilisée. Comme si Paul arrêtait de réfléchir à partir du moment où le récit débute. On quitte ainsi le film avec l’impression désagréable que tout cela n’a servi à rien.

Et c’est bien là que se trouve l’aspect le plus terrible de tout ce projet. Un mariage sans fin est profondément inutile. Bien évidemment, on pourrait répliquer que l’art n’a pas à être utile. Encore faudrait-il que le long-métrage ait pour ambition d’être une œuvre artistique. Au lieu de cela, on a un film dont la seule raison d’exister est de créer du contenu ainsi que du temps de visionnage. Aucune envie, aucune personnalité, rien d’autre qu’une répétition. C’est le spectateur qui termine dans une boucle temporelle infernale.

Un mariage sans fin est disponible sur Amazon Prime Video depuis le 30 mai 2025.

Affiche Un mariage sans fin
Rédacteurs :
Résumé

Remake désincarné, comédie qui se veut grinçante mais ne décroche pas le moindre sourire, Un mariage sans fin est un échec complet. Un énième film de plateforme aussitôt vu, aussitôt oublié.

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Woking Dead
Woking Dead
il y a 1 jour

En meme temps, Palm Springs c’est pas fou non plus. C’est un gentil petit film du samedi soir, au grand maximum. Donc, le matériau de base n’étant pas exceptionnel on imagine la purge que doit être son adaptation française.

cidjay
cidjay
il y a 2 jours

et un yaourt nature sans sucre ajouté (contenu) pour un pot en plastique industriel (Amazon prime) de plus.

francoismarot
francoismarot
il y a 3 jours

Palm Springs avait été une fantastique surprise pour moi. Ici… J’ai é le film à me demander « mais pourquoi ?! pourquoi ! » en boucle. Il n’est pas nullissime, mais juste fade et inutile.