Alors que le monde se pétrifie dans la crainte du bug de l'an 2000, Catherine Zeta-Jones en étendards d'un divertissement aussi bêtement régressif que jubilatoire.
La fin des temps, À nous la mort, À tombeau ouvert... Les titres des sorties cinéma de ce XXe siècle agonisant ne poussent pas franchement à l'optimisme, et ce n'est pas Matrix et son avènement des machines qui redonneront foi en l'avenir. Heureusement, Haute Voltige est là pour apporter un peu (beaucoup) de légèreté !
Sous l’œil mi-sarcastique mi-libidineux de Sean Connery, Catherine Zeta-Jones essaie de nous aguicher dès l'affiche avec son décolleté plongeant, son déhanché-scoliose et son attitude de défi. Dommage qu'on reconnaisse à peine ses traits photoshoppés... La promesse du film de Jon Amiel est celle d'un coup d'un soir : il ne changera pas votre vie, mais vous offrira, si vous êtes dans les bonnes dispositions, un pur moment de plaisir.
Parade nuptiale ou chant du cygne pour Sean Connery
Haute Voltige s'inspire ouvertement du thriller romantique La main au collet, avec son cambrioleur à la retraite qui, mis en cause par l'émergence d'une rivale talentueuse, s'engage dans un jeu du Chat et de la souris avec les autorités... et sa concurrente. Il fond les codes du film d'arnaque des années 60/70 dans le cahier des charges du divertissement hollywoodien de la fin du siècle.
Son réalisateur britannique Jon Amiel, qui a déjà donné dans le clin d’œil hitchcockien avec L'homme qui en savait trop... peu deux ans plus tôt, est si étroitement rattaché aux années 90 que sa filmographie y est presque tout entière enclose. Après un premier long-métrage remarqué (La Dame de cœur en 1989), il fait tourner une palanquée de stars (Bill Murray, Sigourney Weaver...) dans des projets dont la trace laissée dans l'histoire du cinéma reste inversement proportionnelle à la renommée de ses interprètes.
En lieu et place de Cary Grant et Grace Kelly, Sean Connery et Catherine Zeta-Jones se livrent à un numéro de charme, alternant joutes oratoires à fleuret moucheté et acrobaties synchronisées. L'actrice confirme son avènement hollywoodien, juste après le formidable Masque de Zorro de Martin Campbell.
Quant au Sir écossais, également producteur, sa popularité reste intacte après une décennie fructueuse dans la lancée d'Indiana Jones et la dernière croisade, dont on retient notamment À la poursuite d'Octobre rouge, Rock... Mais l'immortel accuse des signes de fatigue, comme en témoigne Highlander, le retour : Haute Voltige demeurera l'un de ses ultimes films et consacre une forme de age de relai entre ses deux principaux interprètes.
On n’attrape pas des mouches avec Amiel
La parade nuptiale des deux protagonistes constitue le combustible majeur du scénario, qui surfe sur les traînées érotisantes de la vague post-Basic Instinct. S'il ne se réclame pas du caractère sulfureux ou transgressif de Striptease (aussi avec Ving Rhames, toujours dans les bons coups), Proposition indécente et autres Showgirls, Haute Voltige fait clairement de la tension sexuelle (présumée) entre ses héros son argument principal.
Si la formule peut paraître simple, le pari est payant : le film satisfait globalement les attentes des spectateurs et encaisse 212 millions de dollars pour un budget de 66 millions. Il devient un petit incontournable de la décennie, jalon d'un monde qui, n'ayant pas connu le 11 septembre et ses suites, peut faire d'une scène proche du waterboarding une péripétie sans conséquence.
Fais donc ça, fais-le fondre avec ton gros laser
L'ADN fun de Mission impossible et James Bond
Bien que n'étant pas un film d'espionnage, Haute Voltige en reprend certains codes (double jeu, infiltration) au point de paraître par de nombreux aspects à la croisée de Mission Impossible et James Bond. Outre qu'il possède en Sean Connery (à jamais le premier) et Ving Rhames un acteur identifié à chacune des sagas, il singe leur décontraction narrative, où la cohérence est régulièrement sacrifiée sur l'autel du retournement de situation sensationnel.
Le scénario enchaîne donc les twists quitte à frayer avec la crétinerie. Que lui importe que les réactions des personnages ne fassent pas toujours sens, que les doutes sur leur allégeance apparaissent bien artificiels ou que le monde dans lequel ils évoluent soit spectaculairement dépourvu d'autorités compétentes ? Seul compte le plaisir instantané.
Haute Voltige reprend les duperies enchâssées et le jeu de masque, ici métaphorique, de Mission Impossible. Si les séquences d'infiltration dans des lieux sécurisés au laser évoquent l'opus séminal de Brian de Palma, l'oeuvre d'Amiel semble surtout préfigurer les scènes d'action outrées emballées par John Woo l'année suivante, mais également l'attrait quelque peu phallique de la saga pour les gratte-ciels : difficile de ne pas penser au Burj Khalifa de Ghost Protocol.
De James Bond – Le monde ne suffit pas sort aussi en 1999 – il embrasse l'ère débilo-fun de Pierce Brosnan avec une tendresse particulière pour les gadgets. Explosifs, terminaux crackeurs de code, nécessaire d'escalade urbaine et autres machineries sur vérins, le réalisateur déballe toute la panoplie du parfait petit monte-en-l'air comme dans un bon télé-achat.
De la même manière que dans la saga inspirée de Ian Fleming, le scénario est clairement structuré autour d'une alternance de morceaux de bravoure et de destinations dépaysantes : on prépare minutieusement le plan dans un château écossais noyé de brume avant de partir à l'assaut de la capitale malaisienne Kuala Lumpur.
La ligue du gentleman infraordinaire
Le bug cringe avant l'an 2000
Un fessier rebondi emplit le cadre, glisse et ondule au gré d'une chorégraphie lascive, tandis que sa propriétaire aux yeux bandés s'abandonne aux instructions dirigistes de son maître du jeu. Si les téléspectateurs du début des années 2000 ont pu croire qu'ils venaient de s'asseoir sur la télécommande et basculer d'une rediffusion de Haute Voltige à un porno très soft M6 pré-Fifty shades, il n'en est rien. Lorsqu'il s'agit de mettre en scène l'entraînement de l'héroïne pour l'esquive des lasers, Amiel n'y va pas avec le dos de la cuillère – avec son cul, à la rigueur.
Le problème, c'est que même sans vouloir à tout prix lui plaquer une grille de lecture contemporaine à coup de male gaze, cette sexualisation basse du front de Zeta-Jones travaille contre son personnage, censé être avant tout une génie du cambriolage doublée d'une menteuse aux nerfs d'acier pour jouer sur deux ou trois tableaux (de Rembrandt) simultanément. Raté : dès sa deuxième scène, on en retient qu'elle est à poil dans un lit, soumise au regard d'un Sean Connery venu la mat... discuter avec elle à l'improviste, quelques minutes avant qu'un second rôle déclame en riant à son sujet que "c'est la robe qui fait la femme" – en tout cas, ce n'est pas le stylo qui fait le dialoguiste.
Le poids des mots, le choc des fessiers
C'est d'autant plus gênant que la romance au cœur du film implique un quasi septuagénaire et une trentenaire. Quarante ans d'écart, ça commence à se voir, surtout lorsqu'il s'agit de matérialiser à l'écran une attraction physique plus que théorique, sauf appétence gérontophile. Haute Voltige est devenu à son corps défendant un excellent symbole de la problématique des différences d'âge dans les couples cinématographiques, qui poseraient moins question si elles n'étaient pas à 99% dans le même sens.
Et on era sur les incongruités visant sans doute à ne pas humilier l'ancêtre, comme le fait qu'une jeune acrobate surentraînée galère davantage qu'un grand-père ankylosé à progresser suspendue à la force des bras. Jon Amiel revendiquait "un film d'action intelligent avec du cœur", mais sa note d'intention n'a pas survécu au torrent de kitsch dans lequel il l'a noyée.
L'architecture a son label « patrimoine du XXe siècle », qui distingue parfois des abominations esthétiques dont la seule valeur est d'être profondément le produit de leur temps. Si son équivalent cinématographique existait, Haute Voltige constituerait un excellent candidat, pour sa manière décomplexée d'incarner une certaine idée du divertissement des années 90.
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Je l’ai vu il y a des années. D’après mes souvenirs, je l’ai adoré.
J’ai souvenir d’avoir é un bon moment devant ce film, que j’avais même acheté ensuite en VHS. Ca fait des années que je ne l’ai pas revu, cependant. Il fait partie de ces films que je note sur ma liste à revoir, avec mes enfants. Le genre de film divertissant bien fait, sans être mémorable.
Catherine Zeta-Jones sortait tout juste du succès du « Masque de Zorro », il me semble (autre film que j’avais acheté en VHS après l’avoir vu au cinéma), c’était l’actrice montante du moment. Ce petit duo ancienne/nouvelle génération était sympathique, et j’ai souvenir d’une fin à la fois classique et satisfaisante.
Haute Voltige est un film sympathique et vaut surtout pour son tandem formé par Sean Connery et Catherine Zeta-Jones. Sean Connery y interprétait un cambrioleur de haut vol, comme Clint Eastwood dans Les Pleins Pouvoirs. Pour ma part, les deux derniers bons films avec Sean Connery sont À la rencontre de Forrester et Rock.
C’était déjà nul à sa sortie . Je m’en rappelle très bien. A part le fameux plan sur le cul de Catherine zêta jones , évidement
@Faurefrc
Joli tacle. 😉
Oui le cœur du récit se déroule lors du age à l’an 2000. Un film de divertissement comme je les aime pour ma part où le spectaculaire bien présent n’empêche pas des personnages construits, des dialogues pas nunuches et un vrai scénario pas uniquement prétexte à des bastons .
@Ethan :
Si c’est un des meilleurs films que tu aies vu, tu n’as pas dû en voir tant que ça 🙂
Ce film là je me souviens l’avoir vu à sa sortie sur TPS star à l’époque lorsque parfois on avait les chaînes gratuites, pour moi un très grand film Sean Connery un peu comme à l’époque de bond mais la surprise c’est Catherine zeta Jones voleuse espiègle très investi il me semble dans son personnage niveau physique, la fin émouvante du film touche entre les deux personnages
La dernière scène avec la petite musique qui accompagne les deux personnages et le métro qui e vraiment bien fait
Un des meilleurs films que j’ai vu
De mémoire l’histoire se e pendant la nuit du Nouvel An 1999-2000