Après deux saisons miraculeuses hébergées par la BBC, Black Mirror a ret l’écurie Netflix. Plus de budget, un rythme de production accéléré… à l’heure de sa saison 5, la série paraît distendue, éparpillée, fantomatique. L’heure est-elle venue d’en finir avec ce show au bord du précipice ?
L’arrivée de Charlie Brooker d’accélérer considérablement sa reconnaissance, gagnant presque instantanément une visibilité internationale. Devenu immensément populaire, le show a hacké les cerveaux de millions de spectateurs grâce à une saison 3 sacrément musclée.
Riche de 6 épisodes, dont les glorieux Nosedive et San Junipero (dont nous vous causons en détail dans notre dossier consacré aux meilleurs segments de Black Mirror), cette fournée fit néanmoins tiquer les fans de la première heure, qui notèrent que pour la première fois, quelques épisodes semblaient un peu précipités, superficiels.
Ces griefs n’ont fait que croître avec le temps, jusqu’à l’actuelle saison 5, qui a reçu les retours les plus glaciaux jamais enregistrés par la série. Faut-il briser le miroir noir ?
Une saison qui ne nous en a pas mis plein la figure
CHARLIE SURBROOKÉ
Charlie Brooker l’a prouvé par le é, il est un créateur de premier ordre, capable d’analyser son époque avec une acuité parfois sidérante, mêler plusieurs niveaux de lecture, de réflexion, et embrasser quasiment tous les aspects de la SF. Il faut ainsi se rappeler la phénoménale richesse de White Christmas, ou Hated in the Nation, qui traitaient avec malice d’innovation technologique, tapaient avec justesse sur nos tropismes pervers et se révélaient parfaitement narrés en dépit de leur complexité.
Il est d’autant plus frappant de constater que ce niveau d’imbrication a totalement disparu de la série. Pour autant, Brooker n’est pas subitement devenu incompétent, et aucun espion numérisé dans une clef USB n’est allé réécrire le script des derniers épisodes. Mais il faut envisager deux possibilités directement liées à l’auteur.
Premièrement, Charlie est rincé. Ce n’est pas vraiment une spéculation, il le répète lui-même depuis la sortie, quelques mois avant la saison 5, de l’expérience Bandersnatch. Le showrunner maintient un rythme de production dément, et on voit mal dans ces conditions comment il pourrait bien faire pour maintenir son niveau d’exigence initial.
Avec des épisodes lorgnant régulièrement sur la durée d’un long-métrage indépendant, impossible de tenir le tempo, à fortiori en assurant quasiment seul la coordination d’un si vaste ensemble.
"Je fais presque tout tout seul, et je suis un peu fatigué du coup"
SCIENCE-FRICTION
À bien y regarder, un épisode de la saison 5 de Miley Cyrus interprète une star de la pop, adulée par des millions de jeunes gens, dont le statut de star positive est devenu une croix qu’elle ne veut plus porter.
Sous le joug de sa manager, faussement bienveillante, elle se voit littéralement transformée en vache à lait créative, les individus profitant des retombées de son travail n’étant pas prêt à lui laisser recouvrer son indépendance créative et morale.
Personnages en quête d'évasion...
Et si c’était une bouteille à la mer envoyée par Charlie Brooker ? Le scénariste est-il si pressuré, exténué, prisonnier d’un flux qu’il ne peut maîtriser ? Bien sûr, il serait ablement ridicule de se représenter les équipes de Netflix comme autant de marâtres de conte de fées, assoiffées de sang et de royalties, mais en l’état, l’ultime épisode de la saison 5 ressemble autant à un testament qu’à un appel à l’aide. Et à bien y regarder, cette logique de l'échappée belle irrigue toute la saison.
Le premier chapitre traite de deux hommes enfermés dans la routine, cherchant désespérément une issue vitale, quand le deuxième montre tragiquement comment l'enfermement d'un système (ici un ersatz de Twitter) pousse à la mort et à la négation de soi. De là à se dire que si la série se désintéresse un peu de sa direction d'acteurs, c'est peut-être parce qu'elle parle désormais directement de son créateur, il n'y a qu'un pas.
PUTRÉ-FICTION
Brooker semble désormais travailler dans des conditions incompatibles avec la finesse initiale, et on n’est pas loin de voir un témoignage de détresse dans ses derniers travaux. Mais ce qui fait dire que Black Mirror a peut-être fait son temps, c’est bien le contenu actuel de la série.
Bandersnatch avait de la valeur en tant que stricte expérience narrative, mais avait déjà de quoi frustrer, après une 4e saison inégale. Choix artificiels, enfilades de clichés, conclusions finalement peu nombreuses… L’intelligence de l’interface et le ludisme du procédé n’effaçaient pas ces limites évidentes, tout comme ils ne pouvaient dissimuler que Black Mirror semblait perdre un peu de vue ses origines science fictionnelle.
Et cette dimension s’est encore accentuée dans la saison 5. Au final, seuls certains accessoires (les connecteurs temporaux), présents depuis plusieurs saisons, et certains codes narratifs (les téléchargements de conscience) sont encore là pour évoquer l’ADN du show. Ce dernier a d’ailleurs progressivement et subtilement changé de nature.
Initialement, Black Mirror se penchait sur les cas particuliers d’individus confrontés simultanément à des problèmes profonds et intemporels, ainsi qu’à un artefact technologique qui en modifiait l’appréhension. D’où des considérations parfois vertigineuses sur notre rapport aux "Blacks Mirrors", ces écrans noirs que nous scrutons quotidiennement, et qui nous renvoient vers un abîme que la série ne cesse d’explorer.
Mais le show s’est déplacé vers la pure anecdote. Striking Vipers nous dit-il quelque chose du rapport au virtuel ou de la manière dont il peut bouleverser nos affects et sexualités ? Non, il se conclut sur une banale leçon d’adultère. Smithereens met de côté tout argument SF préférant un drame moralisateur qui e complètement à côté de la philosophie Black Mirror (on en vient à se plaindre qu’une corporation ne disperse pas les mots de e et données de ses clients !). Quant au troisième évoqué plus haut, c’est une comédie familiale qui caricature grossièrement le fonctionnement de l’industrie culturelle.
Manifestement, Black Mirror, tout comme le show semble lui aussi se chercher, une logique, une identité nouvelle. Du coup, on rêve de voir Brooker s’attaquer à des projets nouveaux, et Netflix en finir avec cette impressionnante anthologie tant qu’elle peut encore apparaître comme une grandiose expérience.
Le genre et l’auteur ne s’en porteront que mieux et comme le montre brillamment Years and Years, la relève est déjà là.
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@WalterB
Il y a un « macaron » : une étoile noire sur fond jaune sur la homepage, sans parler des divers avertissements notamment sur les réseaux. Il y a donc de grandes chances pour que ça apparaisse, peu importe comment le lecteur arrive ici. Mais on pourrait la rajouter en haut encore effectivement.
Ceci est le deuxième article abonné, on essaie donc encore beaucoup de choses, avec nos ressources et notre petite équipe 😉
@Piko Je pense que le problème vient du fait qu’il n’y a aucune indication au moment de cliquer sur l’article prévenant le caractère « » de l’article.
Pour ma part je suis d’accord avec lui, la frustration est grande quand tu t’attends à lire un article et qu’au moment de rentrer dans le vif du sujet on te dit de er à la caisse. Tu demeures un tantinet la bite à la main.
@Ecranlarge Si je peux me permettre de vous donner un conseil en matière d’UI, apposer un petit macaron sur les articles réservés aux abonnés permettrait d’éviter ce genre de débordement des chantres de la gratuité (qui sont toujours courtois bien évidemment). 🙂
@karlito
Y’a quoi de pas clair ?
C’est littéralement écrit « La suite est réservée aux abonnés » avec les tarifs 0_0
Les journaux comme « Le Monde » laisse aux lecteurs lirent l’introduction à l’article et indique qu’il faut er à la caisse pour la suite. Par contre, je pense que cela devrait mieux indiqué pour éviter la confusion.
C’est un peu le jeu des s de mad movies. Sauf que eux c’est pour le mag. Rien contre la démarche. Reste les bons articles gratuits, enfin, avec pub.
Vu que la 1ère saison, sur le fond intétessant, sur la forme assez faible.
@kobrakaï
Cela nous semble au contraire parfaitement logique d’indiquer un minimum la teneur des articles réservés aux abonnés. Vous achèteriez un billet pour un film dont vous ne savez rien ?
Quant à votre comparaison avec Walking Dead : au moins vous n’avez pas 6 mois à attendre pour connaitre une suite dont vous n’avez que faire… 😉
@Tous
Les abonnement ont été annoncés il y a une semaine, avec article et vidéo, et échanges directs avec les lecteurs. Nous avons annoncé de nouveaux articles, réservés aux abonnés, en plus des articles habituels (et non à la place de).
On explique notre démarche par ici : https://ecranlarge.telechargerjeux.org/films/news/1086257-ecran-large-lance-un-abonnement-et-texplique-pourquoi
Les gens ont tellement l’habitude d’une « gratuité illégale », que dès qu’il faut mettre la main à la poche ça enfile son gilet jaune.
Là où EL n’est pas malin, et vous allez perdre du monde les gars, c’est dans sa manière d’agir.
Ou l’article est gratuit en intégralité, ou il ne l’est pas. Puis vlà l’article en plus… C’est limite un cliff à la The Wlking Dead.
Bah oui faut payer pour lire Simon Riaux les gars ^^